Le réformiste, le «nouveau» Barack Obama?
Pour bien comprendre le soi-disant revirement politique de Barack Obama depuis quelques semaines, depuis la perte d’un siège de sénateur par le Parti démocrate, il faut prendre ce recul nécessaire que bien peu de commentateurs prennent de nos jours, malheureusement. Nous avons toujours démontré ici que le président des Etats-Unis était un centriste réformiste. Non seulement parce qu’il l’a toujours dit mais aussi parce que tous ses actes en font foi. Rien de nouveau là-dessus, il l’est encore. Oui, mais voilà, de nombreux commentateurs semblent le découvrir après en avoir fait un «liberal», un homme bien ancré à gauche, ce qu’il n’a jamais été/
Ceux qui prétendent que Barack Obama est un homme de gauche estiment que la campagne présidentielle de 2008 avec son mot d’ordre «Change» (le changement) et les mesures prises début 2009, une fois qu’il accédé au pouvoir, ont démontré qu’il était plutôt un «socialiste» qui voulait transformer en profondeur la société.
Le problème est qu’ils ont confondu – sciemment ou non - le conjoncturel et le structurel et qu’ils ont mélangé, souvent malhonnêtement, la nécessité de reconstruire les Etats-Unis et la manière de gouverner un pays reconstruit.
Ainsi, lorsque qu’Obama arrive au pouvoir, il se retrouve devant une grave crise conjoncturelle, non plus essentiellement politique suite à la présidence polarisée de Bush , mais essentiellement économique (avec une décroissance) et sociale (avec un fort taux de chômage). Sa priorité n’est donc plus de réconcilier les Américains entre eux et avec leur pays mais de prendre des mesures d’urgences pour remettre les Etats-Unis sur la voie de la croissance et de l’emploi.
Ces mesures d’urgences, conjoncturelles, n’ont rien à voir avec sa volonté de réformer structurellement le pays et de (re)mettre en place un système consensuel basé sur une volonté de gouverner de manière bipartisane. Cependant, les mesures d’urgences doivent primer parce qu’avant de gouverner par l’équilibre, il faut d’abord (re)trouver les conditions de l’équilibre.
Barack Obama n’est pas responsable de la crise qu’il a trouvé à son arrivée au pouvoir, ni il a inventé les problèmes à résoudre qui ont nécessité des actions fortes avec son plan de relance économique et son plan d’assurance santé. Il n’est pas non plus responsable de la guerre en Afghanistan (provenant de l’attaque du 11 septembre) ni de celle en Irak (provenant d’une volonté de George W Bush). Pour autant, il ne pouvait, ni ne voulait, occulter ces réalités et il les a attaquées de front. S’y attaquant, il s’est retrouvé caricaturé en un volontariste désirant tout chambouler, ce qui n’a jamais été sa vision du gouvernement.
Ainsi, Barack Obama est un centriste réformiste qui a trouvé une situation qui lui imposait d’abord de réparer le système («to fix the system») avant de pouvoir le gérer de manière consensuelle («a bipartisanship government). Mélanger les deux est lui faire un procès d’intention comme c’est le cas actuellement du Parti républicain. Car ce dernier s’est emparé du trouble de la population américaine devant la crise et les mesures fortes nécessaires pour la combattre, sentant immédiatement quel était le danger pour lui si Barack Obama réussissait son pari à rapprocher les Américains et à mettre en place des majorités fluctuantes selon les projets et les réformes (ce que l’on appelle aux Etats-Unis «postpartisanship»). Le mieux était donc de mettre immédiatement en place une confrontation dure qui démontrait qu’il y avait deux camps irréconciliables.
On comprend cette stratégie pour un parti politique qui a peur pour son existence. On comprend moins bien l’intérêt pour le bien être d’un pays que l’on affirme aimer et défendre… Le pire est que cette stratégie a eu un impact fort, à la fois aux Etats-Unis mais aussi dans le monde entier. Les erreurs de communication et stratégiques de la Maison Blanche ont amplifié cet impact dont le résultat, en terme d’efficacité politique pour le bien du pays pourrait bien être catastrophique.
Alexandre Vatimbella