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L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Tienanmen ou la mort de la démocratie universelle

1989 est cette année cruciale pour notre deuxième millénaire actuel où le monde a, tout à la fois, cru en la démocratie planétaire et vu ses espoirs en la liberté universelle se fourvoyer.

Parce que 1989, c’est à la fois la chute du mur de Berlin, le 9 novembre, mais aussi la terreur qui s’est abattue sur la place Tienanmen de Pékin quelques mois auparavant, dans la nuit du 3 au 4 juin, tuerie d’une barbarie inouïe dont nous fêtons le triste trentenaire aujourd’hui.

A l’espoir et à la joie de voir la libération des peuples à l’Est de l’Europe, nous avons également expérimenté, dans la même année, le désespoir et la douleur d’assister, impuissants aux massacres de ce peuple chinois qui voulaient seulement goûter à l’ivresse de cette liberté chérie qui soi-disant ne fait partie de «sa culture» (ce que tous les sondages sérieux, c'est-à-dire non-trafiqués par la pouvoir communiste, disent sans aucune contestation possible).

Mais même si la libération de l’Est de l’Europe de la chape de plomb soviétique continua – la chute du mur est postérieure aux chars de la honte –, c’est bien la révolution mondiale de la liberté qui s’est brisée ce 4 juin parce que les autocrates du PC chinois ont montré aux peuples encore sous le joug de dictatures que ce mouvement vers la liberté n’était pas inéluctable, ce qu’ont très bien compris très rapidement des régimes comme Cuba, l’Iran, la Syrie, le Vietnam, etc. et que comprennent très bien d’autres aujourd’hui comme la Russie, la Turquie, le Venezuela et toujours Cuba, l’Iran, la Syrie, le Vietnam…

Oui, Tienanmen n’est pas seulement l’écrasement du désir de la démocratie en Chine mais bien la pierre angulaire sur laquelle s’appuient tous les régimes autocratiques, dictatoriaux et totalitaires pour résister et empêcher leurs peuples de les chasser du pouvoir et d’installer des régimes démocratiques.

Sans parler des mouvements terroristes qui, eux aussi, ont trop bien retenus la «leçon Tienanmen» comme Daesh, par exemple, en expliquant, dans un bourrage de crâne aussi simpliste qu’efficace pour des personnalités fragiles et ignorantes, que la «démocratie occidentale» était le diable.

Or, non seulement ce n’est évidemment pas le cas mais, surtout, il ne s’agit pas d’un régime «occidental» mais d’une légitime demande de vivre libre par tout individu vivant sur notre terre.

La Chine est devenue aujourd’hui le modèle de la société totalitaire.

Intelligemment, le pouvoir «communiste» a su jouer profil bas depuis l’élection de Donald Trump, les provocations incessantes de personnages comme Poutine, Erdogan, Orban, Duterte, Assad ou encore Salvini (liste non exhaustive!), pour avancer son «agenda».

Comme Narendra Modi en Inde qui a met en place une société dominée par un nationalisme ethnique et religieux à l’ombre des frasques des mouvements populistes extrémistes, Xi Jinping travaille à l’élaboration d’une société policière de la surveillance des Chinois grâce aux instruments traditionnels de toute dictature mais aussi de toutes les avancées technologiques – sans parler de la présence d’une terrible et gigantesque administration–, qui permettent un fichage de toute une population, le visionnage de tous ses actes, physiques et intellectuels, dans la rue mais aussi chez chaque citoyen grâce à des caméras et des micros, avec un système abjecte de punition et de récompense.

Les «mauvais» citoyens, ceux qui, par exemple, ne traversent pas sur les passages piétons et dont on publie la photo sur des écrans géants de leurs quartiers avec leurs noms et leurs adresses, ne peuvent prétendre à un emploi ou un appartement, les «bons», ceux qui par exemple, dénoncent leurs «mauvais» voisins, peuvent plus facilement voyager et obtenir un crédit.

Sans même parler des prisonniers politiques qui croupissent dans des camps de «rééducation» qui n’ont rien à envier à ceux de la période maoïste (dont monsieur Xi est un admirateur) ou assignés à résidence et victimes sans cesse de brimades.

Oui, c’est cela la Chine du XXI° siècle.

Oui, la victoire du totalitarisme sur la liberté, il y a trente ans, place Tienanmen, voulue par Deng Xiaoping, a engendré une société de la surveillance, de la traque, de la délation et de la mise au pas systématiques, Cette société si redoutée au XX° siècle est en train de se mettre en place grâce aussi au silence assourdissant des dirigeants des  démocraties.

Et l’on se dit que si la révolte pacifique de Tienanmen avait réussie…

Mais on se dit aussi que la Chine, qui ne fait plus mystère de dominer le monde en devenant la première puissance mondiale, a vocation à exporter son «modèle» de société (qui intéresse déjà bien des pays en Asie et en Afrique).

C’est pourquoi, trente ans après, tout démocrate qui se respecte, doit être solidaire de tous les dissidents chinois actuels ainsi que tout aussi volontaire que les manifestants pacifiques de la place Tienanmen, afin d’empêcher les maîtres de Pékin de parvenir à leurs fins.

Oui, ce monde est en train de prendre un virage de plus en plus dangereux où les pires prédictions d’Orwell ou de Huxley ne sont plus des fantasmes mais souvent des réalités présentes ou en devenir.

Peut être que je vois un peu trop le verre à moitié vide.

Alors, vivement le 9 novembre pour célébrer la chute du mur de Berlin!

Tout en pensant à cette jeunesse écrasée sur le macadam face à la cité interdite, lieu d’un pouvoir qui massacra tant de gens aux cours de son histoire…

 

 

 

 

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