Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

La relation ambigüe de Rocard avec le Centre

Michel Rocard est mort à 87 ans et il laisse un héritage politique foisonnant mais controversé, notamment dans sa volonté de moderniser la Gauche et de faire des alliances avec le Centre plutôt qu’avec le Parti communiste.

Personnalité socialiste brillante et aux idées originales voire iconoclastes dans les années 1960-1980, il avait réussi à être le premier ministre de François Mitterrand, ce dernier ayant été obligé de le nommer alors qu’il n’avait que haine et mépris pour l’homme qui avait osé vouloir lui prendre le Parti socialiste.

 

Il faut dire que Rocard n’avait pas hésité à traiter Mitterrand d’archaïque et avait osé le défier en se présentant à la présidentielle de 1981 avant de piteusement se retirer lorsque ce dernier s’était déclaré candidat.

Michel Rocard restera sans doute celui qui aura tenté et réussi en partie à réformer la gauche en faisant du courant socialiste qu’il représentait – une «deuxième gauche» attachée au marché – un courant politique plus proche du réel que d’une idéologie étriquée et à influencer plus ou moins le vieux socialisme.

Il traversa le premier septennat mitterrandien complètement marginalisé et dut son retour en grâce à la volonté de Mitterrand de gagner la présidentielle de 1988 au centre.

Devenu Premier ministre, il accueille dans son gouvernement de très nombreux centristes comme Michel Durafour, Jacques Pelletier, Olivier Stirn, Lionel Stoléru, Jean-Pierre Soissons, Bruno Durieux, Hélène Dorlhac ou Jean-Marie Rausch.

Ce qui prouve bien que le Centre n’est pas inféodé «naturellement» à la Droite même dans la V° République…

Mais cette ouverture au centre qui était la promesse faite par Mitterrand aux électeurs lors de la campagne présidentielle, fut sans lendemain (même si certains centristes demeurèrent dans les gouvernements d’Edith Cresson et de Pierre Bérégovoy) et apparut in fine pour une large part comme une opération politicienne.

Ce qui plaisait chez Rocard aux centristes, c’était cette volonté de se confronter au réel et de vouloir réunir le marché et la justice sociale.

D’où beaucoup de démocrates chrétiens catholiques qui furent séduits par ce protestant.

Malgré tout, Rocard est toujours resté bien ancré à gauche avec, ces derniers temps, des relents doctrinaires qui lui faisaient critiquer ses héritiers déclarés comme Emmanuel Macron et, surtout, Manuel Valls qui pourtant fut un rocardien 100% jusque dans les contradictions de cette pensée politique.

Il faut dire que Valls et surtout Macron n’hésitent pas à s’attaquer de front et avec courage à cette gauche surannée et périmée alors que Rocard demeura toujours un militant discipliné dans les faits.

In fine ses maladresses politiques et ses incapacités à être un vrai leader n’ont pas permis à la gauche de vraiment quitter son archaïsme ainsi que son cynisme envers le pouvoir, illustrés jusqu’à la caricature par un François Hollande qui louvoie constamment en mitterrandisme et rocardisme…

L’amertume de la fin de sa carrière politique et de sa vie ternit un peu le personnage.

Lui qui avait voulu défier la vieille gauche en la personne de François Mitterrand s’était fait rouler dans la farine par ce dernier qui avait récupéré, en partie, ses idées pour se faire réélire en 1988.

Il lui en vouait une rancœur immature et une détestation inextinguible, se répandant en constante récriminations tout en se posant en victime innocente d’un système que pourtant, lui aussi, utilisait pour ses visées personnelles mais qu’il n’a pas toujours maitrisé correctement et c’est un euphémisme de dire cela.

Ce comportement est bien dommage vu ses capacités mais montre les limites d’une stratégie et d’une ambition.

 

Alexandre Vatimbella

Les commentaires sont fermés.