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Du Centre, de l’ambition politique et des candidats centristes à la présidentielle


L’ambition politique recouvre deux choses. La première est de vouloir faire triompher ses idées et de réussir à les concrétiser. La deuxième est de parvenir à des postes de pouvoir importants. Les deux sont évidemment différentes mais elles sont très souvent complémentaires. Vouloir faire triompher ses idées nécessite que l’on occupe le pouvoir (ou que l’on ait suffisamment d’influence pour peser sur le pouvoir, ce qui est plus rare). A contrario, elles peuvent être parfois antinomiques lorsque l’on s’accroche au pouvoir ou lorsque l’on tente de le conquérir au risque de faire perdre ses idées. Bien entendu, on ne parle pas du cas où l’ambition politique ne recouvre que la seule volonté d’un destin personnel sans aucune volonté de faire triompher d’hypothétiques idées.

Le Centre connaît bien toutes ses variantes, même cette dernière où de nombreux opportunistes se sont positionnés au centre de l’échiquier politique au cours de l’histoire pour tenter de capter un électorat sans aucun rapport avec leurs idées politiques ou tout simplement afin de masquer leur absence d’idées politiques. On pense bien sûr au cas de Dominique de Villepin actuellement. Mais l’ancien premier ministre de Jacques Chirac n’est pas le seul à avoir voulu duper les électeurs centristes.

Si l’on étudie maintenant le positionnement de ceux que l’on peut considérer comme d’authentiques centristes ou ayant des idées se rapprochant du Centre, il est intéressant de se demander qui concourt dans la catégorie «faire triompher ses idées avant tout» et qui concourt dans la catégorie «occuper un poste de pouvoir avant tout». Pour limiter les études de cas, je ne parlerai que de ceux qui ont indiqué qu’ils étaient intéressés par être candidat à l’élection présidentielle de 2012. C’est le cas de Jean Arthuis, François Bayrou, Jean-Louis Borloo et Hervé Morin, par ordre alphabétique. Il se peut qu’il y ait d’autres vocations présidentialistes dans les rangs centristes au cours des mois à venir mais, pour l’instant, ils sont quatre.

Dans la catégorie de ceux qui ont d’abord l’ambition des idées, on peut classer en premier Jean Arthuis. Paradoxalement, il est, actuellement, le moins bien placé dans les sondages (ou d’ailleurs son nom n’apparaît pratiquement jamais, les sondeurs ne sondant pas les sondés sur son nom…). Rappelons que le président de l’Alliance centriste se bat avant tout pour un Centre refondé capable de peser politiquement et qu’il est prêt à s’effacer devant tout candidat qui le représenterait mieux que lui.

En ce qui concerne Jean-Louis Borloo, il est assez difficile de se prononcer actuellement sur ce qu’il veut faire gagner. On sait qu’il a des idées mais, voici peu, il était prêt à en mettre quelques unes dans sa poche pour décrocher le poste de Premier ministre de Nicolas Sarkozy en jouant le jeu de la solidarité de la majorité présidentielle, comme il le disait alors. Ses déclarations tonitruantes sur la sécurité et la menace que faisait peser les Roms sont emblématiques à ce sujet.

François Bayrou et Hervé Morin croient avant tout à leur destin personnel. Ce qui n’est pas, en soi, négatif et répréhensible politiquement parlant (cela peut même être essentiel pour gagner une élection, les électeurs votant pour ceux qui ont le plus envie du poste en jeu). On pourrait, par exemple, reprocher à Jean Arthuis un manque d’ambition personnelle et d’appétence pour le pouvoir qui pourraient l’empêcher de faire triompher ses idées. Bien entendu, Bayrou et Morin défendent aussi des idées et auront un programme. Il n’est pas question de prétendre qu’ils ne croient pas réellement en celles-ci et qu’ils ne souhaiteront pas mettre en œuvre celui-ci. Cependant, rappelons-nous les présidentielles de 2007 où François Bayrou s’est dangereusement rapproché de la Gauche afin, si ce n’est de gagner l’élection, de pouvoir récupérer un éventuel poste de premier ministre de Ségolène Royal (même s’il affirme aujourd’hui qu’il a voté blanc). Quant à Hervé Morin, qui a d’abord supporté toute la stratégie de François Bayrou jusqu’après le premier tour, il n’a pas hésité à tourner casaque pour se rapprocher de Nicolas Sarkozy qui l’a récompensé d’un poste de ministre de la Défense. Je les mettrai donc plutôt dans la catégorie de ceux qui sont les plus intéressés par la pouvoir avant tout même si Jean Arthuis et Jean-Louis Borloo ne sont également.  Mais, comme dans le cas de François Bayrou et d’Hervé Morin, auxquels on ne peut dénier qu’ils ont des convictions politiques, la volonté de pouvoir de Jean Arthuis et, à un degré moindre, de Jean-Louis Borloo, est moins prégnante que la volonté de faire triompher leurs idées.

Sur ces quatre candidats, il est également intéressant de se demander celui ou ceux qui compte(nt) se présenter quoiqu’il arrive, refusant de se retirer devant un candidat centriste mieux placé au risque de faire perdre tout le Centre. Leur(s) ambition(s) personnelle(s) pourrai(en)t ainsi morceler le Centre et l’affaiblir encore plus lors de la prochaine présidentielle.

Dans cette catégorie on peut, actuellement, placer François Bayrou qui a déclaré qu’il n’était pas intéressé pas des primaires pour désigner un candidat centriste unique et qu’il n’avait de compte à rendre qu’aux Français, une façon de dire qu’il se présenterait quoiqu’il arrive.

Il est également possible d’y mettre Hervé Morin tant celui-ci répète qu’il sera candidat mais avec un bémol puisqu’il semble aussi accepter l’idée de primaires sans pour autant agir pour que cela soit possible puisqu’il exclut déjà François Bayrou de celles-ci.

Jean-Louis Borloo est encore le cul entre deux chaises puisqu’il n’a pas dit s’il était partant jusqu’au bout.

Quant à Jean Arthuis, il est le seul à se prononcer pour des primaires réunissant tous les candidats à la candidature centriste ce qui inclut, actuellement, lui-même, François Bayrou, Jean-Louis Borloo et Hervé Morin ainsi que tout autre personnalité qui souhaiterait concourir. Surtout, il est le seul à affirmer qu’il acceptera pleinement leurs résultats.

Une autre question qui ressort de ces comparaisons est de savoir qui est le plus centriste de ces candidats potentiels. Pour clarifier le débat sans procès d’intention, on peut reprendre les déclarations directement faites par ceux-ci. François Bayrou a souvent affirmé qu’il n’était pas centriste et a même cherché un terme qui pourrait mieux le qualifier. Même s’il le dit moins actuellement où le Centre retrouve un certain regain d’intérêt dans l’opinion, ses lieutenants continuent à faire des déclarations en ce sens à périodes répétées. En outre, sa vision d’union nationale développée en 2007 vient en contradiction avec une vision centriste. Hervé Morin se déclare de «centre-droit» mais il faut ajouter que, pour lui, le Centre est au centre-droit... Jean-Louis Borloo se déclare «radical», «progressiste», «écologiste», «républicain», plus rarement centriste. Le seul qui ne rechigne pas à se dire centriste tout court est Jean Arthuis.

Le panorama que je viens de dresser peut évidemment évoluer dans les mois à venir et ces hommes auront l’occasion de préciser leur pensée et leur volonté. Néanmoins, les convictions et les postures des quatre candidats qui ne sont pas des novices politiques ne sont pas récentes. En tout cas, elles devraient pouvoir guider les militants centristes, en premier lieu, si ceux-ci sont amenés à désigner un candidat unique puis les électeurs.

 

Alexandre Vatimbella

 

Voir le site Le Centrisme

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