Obama contre Trump, le vrai combat politique américain
Il y a une dimension que les commentateurs de tous bords et de toutes catégories oublient facilement: Trump n’est pas majoritaire et ne l’a jamais été.
Certes, il peut se targuer de la légitimité du système électoral américain (qui n’est pas remis en question pas la majorité des citoyens eux-mêmes) mais cela n’empêche qu’il a été le président le plus mal élu avec trois millions de voix de moins que la perdante, Hillary Clinton…
De même, pour ce que cela vaut, il n’a jamais été majoritaire dans les sondages, sa cote de popularité demeurant anormalement basse depuis son élection en novembre 2016.
Peut-être que grâce aux élections de mi-mandat du 8 novembre prochain, il le sera pour la première fois, par Parti républicain interposé, mais cela n’en prend pas le chemin.
Et si le Parti démocrate devient, lui, majoritaire à la Chambre des représentants comme cela est annoncé par les sondages (ce sera nettement plus difficile voire impossible pour lui de remporter la majorité des sièges au Sénat, renouvelé d’un tiers ce mardi), il le devra en grande partie à… Barack Obama.
Pas seulement parce que ce dernier, avec le brio qu’on lui connait, a décidé de se replonger dans la politique active en donnant des discours et en participant à des meetings électoraux afin de soutenir les candidats républicains mais surtout pour sauver les valeurs de la démocratie américaine et empêcher les projets dangereux de l’aventurier Trump.
Au moment où les activistes de gauche affirment péremptoirement que ce sont les candidats radicaux très à gauche qui donnent une dynamique au Parti démocrate et qui s’en prennent au bilan et à la personne de l’ancien président, celui-ci fait le buzz par son implication dans la campagne où il contre avec talent le populisme démagogique, l’extrémisme et les mensonges de Donald Trump.
Surtout, c’est son bilan qui sera peut-être l’élément-clé de la victoire démocrate.
Ainsi, ce n’est pas l’immigration et les diatribes de Trump contre l’envahissement du pays par des criminels qui se masseraient à la frontière des Etats-Unis et sur lesquels l’armée aurait le droit de tirer qui est le sujet le plus important.
Ce n’est pas non plus l’économie américaine qui connait pourtant une croissance aussi forte qu’étonnante (et qui recèle, pour beaucoup d’économistes, de très graves à danger à court et moyen terme) et dont il faut rappeler qu’elle provient en très grande partie des décisions prises par Obama lors de son double mandat.
Non, c’est sa réalisation la plus iconique, l’assurance-santé pour tous les Américains qu’il a mis en place, que les républicains ont immédiatement baptisé «Obamacare» pour la discréditer et attaquer celui qui l’avait faite voter (appellation qu’Obama avait fait sienne pour montrer qu’il en était très fier) qui est au cœur des préoccupations de la population qui, majoritairement, ne veut pas qu’on y touche.
C’est tellement vrai que les républicains, la queue entre les jambes, se sont tous ralliés à cette réforme sociale essentielle et tentent désormais de la récupérer de manière aussi ridicule que pathétique comme le fait le sénateur du Texas Ted Cruz qui n’a pas peur d’en être le principal défenseur après avoir promis, avec ses amis politiques, qu’une fois au pouvoir elle serait immédiatement «repeal» (abrogée).
Mais c’est aussi la différence de gouvernance entre un Barack Obama, centriste, homme de conviction et de culture, au projet humaniste et progressiste, adepte d’une société ouverte et un Donald Trump, populiste démagogue, flirtant avec les thèses fascistes et racistes, menteur et inculte au projet réactionnaire, adepte d’une Amérique qui se referme sur elle-même, qui est également au cœur du choix que feront les Américains le 8 novembre.
Un choix particulièrement important car il dira si Trump est un malheureux accident de l’Histoire qui devrait se terminer pour le bien de tous en 2020 (à défaut d’avoir pu le faire démissionner ou destituer) ou bien un phénomène bien plus profond et important (en terme de grandeur) comme l’affirme ses supporteurs et certains observateurs de la vue politique américaine.
Une victoire de l’hôte actuel de la Maison blanche serait une terrible nouvelle pour la démocratie républicaine, pas seulement pour les Etats-Unis mais aussi pour le monde entier où les imitateurs du populiste démagogue (comme Bolsonaro au Brésil, Salvini en Italie, Le Pen en France et Johnson au Royaume Uni) seraient confortés dans leurs agissements et pourraient rêver d’autres victoires électorales.
En ce 8 novembre, c’est bien un match Obama-Trump qui va se dérouler et il faut souhaiter une victoire par KO du premier nommé.
Alexandre Vatimbella