La réunion des centres n’est pas pour demain
Jean-Louis Borloo a bien expliqué qu’il cherchait à réunir le centre-droit dans une confédération ou un parti. Du coup, s’il existe un centre-droit, c’est qu’il existe, par définition, un centre-gauche.Et s’il existe une droite et une gauche centristes, c’est par rapport à quelque chose qui se trouve entre les deux, le centre-centre, l’extrême-centre ou, tout simplement, le Centre.
Bien entendu, comme je l’ai affirmé de nombreuses fois, il n’est pas facile d’être positionné sur ce Centrisme du juste équilibre qui définit l’espace politique du Centre car l’on peut pencher parfois trop à gauche ou trop à droite, l’important étant, néanmoins, de toujours rétablir l’équilibre in fine. De même, être du Centre n’est pas de tout repos puisque c’est avoir des adversaires politiques des deux côtés de l’échiquier politique, d’autant que s’y ajoutent le centre-gauche, souvent allié de la gauche et le centre-droit de la droite (ces centres sont parfois dans un même parti avec la Gauche ou la Droite) avant même toute discussion sur un projet ou un programme. Pour autant, il y a donc trois façons d’être centriste ou au centre de l’échiquier politique si ce n’est du Centre.
Pour rendre plus compréhensible mon propos, choisissons de le personnaliser avec les trois B: Jean-Michel Baylet des radicaux de gauche (centre-gauche), François Bayrou du Mouvement démocrate (centre-centre) et Jean-Louis Borloo du Parti radical (centre-droit). Ce n’est d’ailleurs fait injure à aucun de ces trois-là puisque chacun d’eux revendique l’étiquette que je viens de leur attribuer. Le seul questionnement pertinent est l’exact positionnement de François Bayrou qui a varié ces dernières années mais force est de reconnaître qu’il n’est ni du côté de Baylet, ni de celui de Borloo. C’est d’ailleurs cela qui fait, entre autres, que la réunion des centres n’est pas pour demain. Il semble, en l’état, impossible que le Mouvement démocrate de François Bayrou rejoigne l’UDI (Union des démocrates et indépendants), le groupe parlementaire créé et dirigé par Jean-Louis Borloo et qui réunit tous les partis qui s’affirment du centre-droit par la voix de leurs leaders (un seul pourrait être plus central, Force européenne démocrate, le nouveau parti de Jean-Christophe Lagarde, mais ce dernier est le porte-parole de l’UDI, positionnée explicitement au centre-droit).
La preuve, le nouveau refus de Jean Lassalle (un des deux députés du MoDem, l’autre étant rattaché au groupe des Radicaux de gauche) d’en faire malgré tous les efforts déployés par ses membres pour cette «prise de guerre» hautement symbolique. Autre évidence que la réunion des centres n’est pas à l’ordre du jour, l’absence des Radicaux de gauche de Jean-Michel Baylet à toute discussion sur un Centre uni. Même si Baylet a évoqué cette possibilité plusieurs fois au cours des dernières années (la marginalisation de son parti par les socialistes en étant une des raisons), la présence des Radicaux de gauche dans la majorité présidentielle et dans le gouvernement dirigé par les socialistes montre que l’éventualité d’un rapprochement est actuellement illusoire.
Dès lors, les centristes vont continuer à marcher sur trois pattes. Et ce, même si le Mouvement démocrate décidait de rejoindre la majorité de gauche car il ne se réunirait pas avec les Radicaux de gauche. Peut-être que ces pattes seront de tailles différentes et que le centre-droit réuni deviendra une force politique importante alors que le Mouvement démocrate aura du mal à résister à l’implosion. Mais nous n’en sommes pas encore là.
Evidemment, la dispersion centriste est une grande faiblesse en matière de force politique. Les dernières élections présidentielles et législatives en ont été la preuve. Et elle produit un effet réducteur de l’importance politique du Centre, ce qui permet à la Gauche et à la Droite de grignoter l’espace centriste et aux médias d’annoncer la disparition programmée des partis centristes ou leur transformation en groupuscules. En revanche, en étant présents à gauche et à droite, les centristes ont la possibilité d’influer sur les politiques des deux blocs principaux, ce qui est plus souvent le cas qu’on ne le pense. Non pas parce qu’ils inspirent de la crainte mais parce qu’ils permettent de modérer les initiatives trop idéologiques des deux extrêmes, en particulier de celle qui occupe le pouvoir au grand soulagement d’une majorité de la population.
Pour autant, rien ne remplacera un Centre uni avec un projet centriste ambitieux faisant la part belle aux valeurs du Centrisme. Mais cette configuration n’est pas pour demain. Surtout, la question n’est pas «quand cela sera-t-il possible?» mais plutôt «est-ce possible?», tout court…
Alexandre Vatimbella
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