Le «vrai» centriste, c’est celui qui dit qu’il l’est… ou pas!
L’espace au centre est toujours convoité quand arrivent les présidentielles. Du coup, les personnalités politiques à se déclarer centristes ou à se trouver des accointances avec les idées centristes, deviennent de plus en plus nombreuses à mesure que l’échéance électorale principale de la politique française se rapproche.
Limitons-nous à ceux qui se déclarent centristes. Bien sûr, nous avons parlé ici maintes et maintes fois de tous ces prétendants. Mais il est toujours intéressant de se rappeler pourquoi ils jurent leurs grands dieux qu’ils sont, chacun d’entre eux, le «vrai» centriste, le seul légitime à réclamer les votes des électeurs du Centre.
Ce n’est pas pour chicaner que nous conduisons cet examen mais parce qu’il est crucial pour le Centre d’être représenté par un ou des candidats qui ont réellement une vision centriste.
Ainsi, quand les médias s’amusent à prétendre que Dominique de Villepin doit être classé dans les candidats centristes à la présidentielle, on aurait tendance à regretter que les cours de sciences politiques ne soient pas obligatoires pour avoir une carte de presse…
Plus sérieusement, trois candidats et quelques «recours» encore dans l’ombre naviguent dans la galaxie centriste et peuvent prétendre à être le fameux «vrai» centriste.
Par ordre alphabétique, ce sont: François Bayrou, Jean-Louis Borloo, Hervé Morin (et Jean Arthuis comme premier «recours»).
Dans ces trois là, les deux qui tiennent actuellement la corde pour représenter le Centre en 2012 sont Jean-Louis Borloo et François Bayrou (même s’il ne faut enterrer définitivement Hervé Morin).
Au-delà de leurs positionnements passés, ce qui est intéressant est leur positionnement présent, celui des deux dernières années. On peut se (re)découvrir centriste sans que cela soit une escroquerie. Sauf si cela se produit juste avant chaque échéance électorale…
Aucun des deux n’a fait, durant cette période, de grands serments de Centrisme, à part ces derniers mois.
Jean-Louis Borloo se disait jusque récemment totalement dans l’UMP, dans une aile sociale de la Droite républicaine mais pas du Centre.
François Bayrou se disait, dans le même temps, démocrate, plus en référence au Parti démocrate américain, au Libéraux-démocrates britanniques de son ami Nick Clegg voire au Parti démocrate italien de son ami Francesco Rutelli, c’est-à-dire, dans son esprit, entre le Centre et la Gauche, dans une tentative de dépassement de l’humanisme centriste par le solidarisme.
On peut donc dire, pour schématiser, que Jean-Louis Borloo est proche du centre-droit sans en être, se présentant comme un républicain-social de droite, et que François Bayrou est proche du centre-gauche, se présentant comme un social-libéral.
Evidemment, cette double affirmation sera critiquée par ceux qui feront valoir les états de service des deux prétendants à l’investiture centriste.
Pour beaucoup, le parcours politique de François Bayrou est bien plus proche de celui d’un homme de Droite que de celui d’un homme de Gauche. Et ses racines démocrate-chrétiennes le légitimeraient, selon eux, au centre de l’échiquier politique français.
Concernant Jean-Louis Borloo, il a toujours navigué, certes à droite, mais dans une vision beaucoup plus consensualiste vis-à-vis des franges modérées qui se mélangent avec elle, voire même avec des mouvances plus éloignées, comme les Verts.
Admettons ces remarques mais rappelons que ce qui nous intéresse ici est le positionnement adopté non pas il y a dix ou cinq ans, ni celui revendiqué depuis trois à six mois.
De ce point de vue, aucun des deux hommes ne s’est épanché sur son appartenance au Centre et n’a fait preuve d’un militantisme centriste particulier.
Nous avons donc deux prétendants à la place de candidat du Centre à la présidentielle qui revendiquent leur légitimité respective sans que celle-ci puisse être établie sans équivoque.
C’est sans doute la raison pour laquelle nous assistons à des déclarations à répétition (plus du côté de Bayrou actuellement) sur leur attachement au Centre et aux valeurs centristes (même si Borloo ne se définit pas comme un centriste mais comme le meilleur représentant des modérés de droite et de gauche et donc aussi du Centre).
N’oublions pas, non plus, les soutiens de Bayrou à la candidature d’Edouard Balladur à la présidentielle de 1995 et de Borloo à celle de Nicolas Sarkozy à celle de 2007, deux hommes que l’on ne peut guère placer au centre de l’échiquier politique.
En attendant la publication de leurs programmes précis, nous serons encore, pendant quelques mois, réduits à les croire sur parole.
Bien difficile pour les centristes qui sont plutôt des pragmatistes et des réalistes s’attachant au réel et non aux discours des opportunistes qui vont et viennent au gré des sondages et des espaces politiques libres.
Car, en définitive, le «vrai» centriste est d’abord celui qui le prouve par son parcours politique.
Alexandre Vatimbella
Voir le site Le Centrisme